Le règne des blancs salins : fraîcheur et minéralité

Impossible d’ignorer l’influence de la mer quand on parle des goûts marseillais. Ici, la fraîcheur prime et le vin blanc naturel s’impose comme un incontournable. D’un point de vue géographique, la métropole s’entoure des appellations Cassis, Bandol, Palette et même de quelques pépites issues des Bouches-du-Rhône et du Var. Les styles les plus recherchés ?

  • Les blancs salins et iodés : Leur profil s’explique grâce aux sols calcaires, aux vents marins réguliers et à une vinification douce. Ces vins, signés par des domaines comme Clos Sainte Magdeleine à Cassis ou Château Simone à Palette (bien que ce dernier ne soit pas 100% nature, certains millésimes ou cuvées tendent vers des pratiques proches du vin nature). S’ils ne s’affichent pas toujours comme “naturels” à la façon d’un “vin nu”, de nombreux jeunes vignerons de la région osent la macération pelliculaire, une vinification sans soufre ajouté ou une faible intervention en cave.
  • Des arômes locaux : Attendez-vous à retrouver des notes de fenouil, citron confit, poire, voire des touches d’anis ou d’herbes sauvages, qui rappellent directement la garrigue toute proche du littoral marseillais.

Une étude menée par Intervins Sud-Est en 2022 souligne que 63% des vins naturels blancs consommés à Marseille proviennent de zones littorales, avec Cassis et Palette en tête. Les bars à vin comme La Part des Anges ou Le Loup Bar proposent presqu’en permanence une belle sélection de ces blancs ciselés. Sans surprise, ils accompagnent à merveille les poissons grillés, bourrides, oursins et plateaux de coquillages, faisant le bonheur des amateurs de produits de la mer.

Explosion de fruits et légèreté : la folie des rouges glou-glou

Qui dit Marseille, dit chaleur – et une inclination naturelle pour des rouges digestes, juteux, à boire frais. Le concept de “glou-glou” est ici vécu comme un art de vivre, celui de la convivialité et de la spontanéité. Les rouges naturels les plus populaires à Marseille se distinguent ainsi :

  • Fruits rouges croquants : Syrah, Carignan, Cinsault et Mourvèdre issus de l’agriculture biologique ou biodynamique, travaillés en macération courte pour maximiser la gourmandise et alléger les tanins. On trouvera facilement ces cuvées chez Domaine Milan à Saint-Rémy ou Domaine La Roche Buissière dans la Drôme, proposés chez les cavistes marseillais.
  • Peu ou pas de soufre ajouté : Ce qui donne parfois des jus légèrement troubles, mais diablement vivants ! Les “rouge-joues” (terme affectif pour ces rouges de soif légers et pimpants) sont aussi particulièrement plébiscités pour les apéros au soleil au Vallon des Auffes ou sur les plages urbaines.
  • Des notes d'épices, de garrigue, de violette : Parfois même une touche de réglisse, qui fait écho aux bonbons d’enfance, ou des nuances de cuir pour les cuvées plus “sages” – la diversité est de mise !

D’après le baromètre Sowine/Dynata 2023, les rouges légers et fruités sont classés premiers dans la consommation de vins naturels par les Marseillais de moins de 40 ans, loin devant les rouges puissants. On peut citer la bouillonnante gamme “mordu” du Domaine La Mongestine, largement servie lors des évènements vin-naturel comme “Le Vin Sud” ou “Bouche à Bouche” au printemps.

La résurrection du rosé vibrant et naturel

À Marseille, la tradition du “petit rosé” coule dans les veines depuis l’enfance — mais attention, pas n’importe lequel ! Fini le rosé-piscine délavé et sans âme… Ici, ce sont les rosés naturels, parfois issus de macérations pelliculaires ou encore d’assemblages atypiques, qui ont fait une entrée fracassante sur la scène des vins d’auteur.

  • Coulées de fruits rouges, agrumes, herbes fines : Les cépages Grenache, Cinsault, Tibouren ou Mourvèdre livrent des jus éclatants, parfois légèrement trouble, parfois colorés comme une pêche sanguine.
  • Vinification sans intrant : Le rosé naturel, par nature, bannit la filtration massive et les corrections chimiques. On obtient des vins à la fois dynamiques, gourmands, et porteurs d’une pointe de tension en bouche.
  • Le retour du vin “gris” : Ces rosés légèrement plus soutenus, parfois issus de vieilles vignes sur calcaire, sont aussi en vogue dans plusieurs bars à vin du centre-ville.

Selon une étude de l’Institut Français du Vin (2022), les rosés naturels représentent déjà plus de 13% de la consommation totale de vins rosés dans la région PACA. Le Domaine du Clos de l’Ours et le Domaine Sainte Marie, dans le Var voisin, font partie des noms plébiscités par les Marseillais à la recherche d’originalité et d’intensité aromatique. Beaucoup de bars “à vins vivants” comme Ô Vins d’Anges ou Rolls servent ces rosés naturels bien frais aux accros du coucher de soleil façon Corniche.

Bulles naturelles et pétillant ancestral : l’effervescence nouvelle vague

Sur la table marseillaise, les bulles ont longtemps appartenu au monde du champagne ou du prosecco. Mais les pétillants naturels (ou “pet-nat”, pour les intimes) n’ont jamais été aussi demandés ! Portés par les jeunes vignerons de la Méditerranée, mais aussi venus d’Auvergne, de Loire ou d’Italie, ces vins effervescents sont proposés en apéritif ou tout au long du repas par les meilleurs spots de la ville :

  • Légèreté et fraîcheur : Des bulles fines, très peu dosées voire pas du tout, qui cochent toutes les cases pour désaltérer après une session de pétanque !
  • Aromatique marquée : Poire, pomme verte, citron, noisette ou fleurs blanches pour les blancs, fraise, cerise ou framboise pour les rosés.
  • Assemblages éclectiques : Clairette, Ugni blanc, Grenache, Chenin, ou Pinot noir… La diversité règne et stimule la curiosité.

Les événements comme La Nouvelle Vague des Pet-Nat rassemblent chaque année plusieurs milliers d’amateurs autour de ce style en pleine expansion (source : Vitisphere, chiffres 2023). En 2022, on estime que la consommation de pétillants naturels a progressé de 41% à Marseille, avec un public jeune, audacieux et attaché à l’aspect ludique de ces vins. Si le domaine Les Vignes de l’Angevin (Loire), les cuvées “Moussaillons” de Milan Nature ou encore le pet-nat du Domaine de Sulauze font recette à Marseille, c’est aussi grâce à une vague néo-cavistes dynamique (Couleurs de Vigne, La Cave des Papilles, etc.).

Diversité, originalité : l’éveil des vins oranges et autres expérimentations

Marseille aime sortir des sentiers battus… et la ville n’est jamais en retard d’une aventure sensorielle. L’un des styles montants, encore minoritaire mais charismatique, est sans conteste celui des vins oranges — ces blancs vinifiés comme des rouges, par macération pelliculaire prolongée.

  • Couleur ambrée, sensations nouvelles : Les vins oranges, longtemps marginaux, prennent place sur les cartes branchées de Marseille. Au programme, structure tannique, notes de zeste d’orange, de thé noir, de coing et d’épices douces.
  • Cépages oubliés ou redécouverts : Grenache blanc, Rolle, Clairette — travaillés en pur jus, sans intrant, souvent en amphore ou en cuve béton brut.
  • Accords de caractère : C’est le compagnon idéal pour une cuisine provençale audacieuse, comme une bourride safranée ou une ratatouille légèrement épicée.

Les chiffres restent anecdotiques mais la tendance est là : d’après La Revue du Vin de France, le nombre de références en vins oranges naturelles a doublé en trois ans sur les étagères marseillaises, même si cela ne pèse que 2% des ventes globales des vins naturels dans la ville. Les bars “caves-tapas” comme Gigi Café ou Le Chardon aiment jouer la carte de la surprise en proposant ces cuvées à l’aveugle.

Des lieux, des gens, des envies : pourquoi ces styles plaisent tant à Marseille ?

Le succès des vins naturels à Marseille n’est pas un effet de mode isolé mais le reflet d’une demande plurielle et d’un terroir bien vivant :

  • Climat méditerranéen : Qui dit soleil, dit recherche de fraîcheur ! Les vins naturels blancs, rosés, rouges légers et bulles correspondent parfaitement à cette attente.
  • Plats typiques et street-food locale : Panisses, sardines, pieds-paquets ou bouillabaisse — la ville bouge autant dans ses verres que dans ses assiettes.
  • Attachement à l’authenticité : Marseille chérit les vignobles à taille humaine, la parole libre des vignerons, et le plaisir de la découverte, loin des standards standardisés.
  • Mixité culturelle : Chaque quartier, chaque bar, chaque cave accueille des publics variés et fédère autour de la bouteille, du marché de Noailles jusqu’à Endoume ou Cours Julien.

La vague des vins naturels s’est accompagnée de nombreux événements, festivals, marchés éphémères et dégustations dans des lieux toujours plus insolites. Sans oublier la montée en puissance des femmes vigneronnes, souvent à l’origine des cuvées les plus audacieuses (source : Vitisphere, 2023).

Explorer et déguster : adresses à connaître et conseils pour s’initier

Pour découvrir cette diversité de styles, voici quelques recommandations concrètes pour se plonger dans le bain marseillais du vin naturel :

  • Cavistes spécialisés : La Part des Anges (cours Julien), La Cave de Baille, Les Buvards pour une sélection vivante et bien sourcée.
  • Bars à vin emblématiques : Rolls, Gigi Café, Ô Vins d’Anges, La Relève.
  • Événements incontournables : Bouche à Bouche, Le Vin Sud, Nouvelle Vague des Pet-Nat.
  • Marchés et rencontres : Les brocantes “vin & vintage” ou les ateliers de dégustation organisés régulièrement à la Friche de la Belle de Mai.

Ce qui fait le charme du vin naturel à Marseille, c’est la diversité, l’énergie collective, mais aussi la capacité d’innovation et d’audace. Osez sortir des sentiers battus : demandez conseil, testez, comparez, explorez. Les styles populaires ne sont pas figés : chaque rencontre et chaque bouteille réservent leur lot de surprises. Derrière les étiquettes, ce sont toujours des histoires d’humains passionnés qui s’expriment. À Marseille, le prochain verre est peut-être votre nouvelle rencontre favorite !

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